« Je n’ai jamais cru à grand-chose. La plupart du temps, je vois des paysages, mais Laure m’a appelé quand je ne regardais rien. »

Le premier roman d’un poète qui inaugure une nouvelle collection littéraire, Corps célestes.

L’arbre en face de la fenêtre, c’est l’unique paysage de Julien. Il vit seul depuis son accident. Parfois il y a du soleil, mais il ne voit rien : une brume d’alcool et d’antalgiques lui barre tout chemin comme toute croyance. Il ne fait qu’une chose : il attend.

Alors il n’est pas surpris quand Laure, une cousine éloignée, revient vers lui après quinze ans de silence. Enfants, ils passaient leurs vacances dans les Pyrénées. Ça s’est fini, sans explication. Aujourd’hui, Laure revient pour le guérir. C’est en tout cas ce qu’elle lui dit, mais Julien sait qu’elle n’a jamais été aimée. Une nuit d’orage, à la montagne, ils ont failli mourir. Tout vient de là, affirme-t-elle. Son mal à elle, l’accident, et tout le reste.

S’il accepte de l’accompagner, elle connaît un vieux couple de guérisseurs capables d’apaiser sa douleur. Julien ne croit en rien, pourtant il prend quelque plaisir à se laisser faire. Et puis Laure décide qu’il leur faut retourner dans les Pyrénées. La guérison, là-bas, vaudra levée du mystère. Mais qui, dans ces montagnes si loin de l’enfance, saurait les faire revivre ?

Carcan chimique faisant battre le pouls de la vie de Julien qui s’étiole dans le temps et dans la douleur. Un accident de route et son monde s’écroule depuis. Des journées qui se ressemblent et qui ne veulent plus rien dire, perte du temps et de l’espace.

 

Et puis telle une apparition miraculeuse, Laure s’immisce dans ce quotidien macabre. Elle le dépoussière et invite son cousin à reprendre possession de son corps. Un vieux couple, lui magnéticien et elle cartomancienne. La solution. Il se prête au jeu sans grande conviction pour sa cousine, au point de partir dans les Pyrénées. Ils seront recueillis par les enfants de ces derniers. Au cœur de cette nature sauvage et accueillante, les maux s’effacent pour l’un et s’embrasent pour l’autre, surgis du passé.

 

Jérémie Decottignies décortique, avec une rare sensibilité et une extrême douceur, les blessures ancrées dans l’âme. Une balade où les cinq sens deviennent le moteur d’un heureux futur. La trame dramatique percute cet espace conférant un suspense haletant. L’auteur aime s’amuser avec les non-dits et laisse le lecteur se faire une propre idée à la folie humaine.

 

La poésie s’échappe, bucolisme atypique, et rend cette expérience d’autant plus marquante.

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