AMOURS MANQUÉES, un roman de Susie Boyt.

Published by

on

LITTÉRATURE CONTEMPORAINE

Éditions La Croisée

Ruth, professeure à Londres, n’a presque plus de contact avec sa fille Eleanor, toxicomane qui vit dans les bas quartiers. Elle s’en accommode, mais lorsqu’Eleanor a un bébé, Lily, Ruth n’écoute que son instinct et commet un acte ambigu : elle revoit sa fille, mais prend l’enfant avec elle et tente de la couper de sa mère. Au fil des ans, dans ce huis clos familial nimbé de tendresse mais aussi d’angoisses et de culpabilité, trois vies vont se lier et se délier.

Dans la veine de Claire Keegan, Susie Boyt met en scène avec une précision redoutable la question cruciale du noyau familial, dans sa douceur et sa cruauté. Avec une grande finesse psychologique, au fil d’une plume d’une beauté classique envoûtante, Amours manquées expose au grand jour les liens maternels tranchés, les amours empêchées par les affres de la vie. Traduit de l’anglais par Stéphane Vanderhaeghe.

Ma note : 4,5/5

De mères en filles

L’amour est un sentiment étrange. On peut le donner sans commune mesure, sans rien attendre, le voir grandir, s’épanouir, se délier, se lier, réchauffant avant tout le cœur. Cependant l’amour n’a aucune obligation d’être rendu. Alors, il peut être maladroit, absent, parfois violent dans ce silence morbide. En général, il est ce ciment invisible qui lie les gens d’une même famille, des amoureux, des enfants et leurs parents et bien plus. 

 

Comment être la mère de sa fille toxicomane ? Comment être la grand-mère d’une petite fille innocente ? Comment taire le passé violent qui unit toutes les femmes de cette famille ? Comment avancer dans l’absence des pères ?

 

Pas-à-pas, autour d’ellipses, Susie Boyt dépeint l’histoire de ses femmes confrontées à la pauvreté et à la violence de l’abandon. L’amour comme seule arme, les livres comme seul bouclier, et toute la vie pour bâtir la sécurité d’un foyer. Pourtant, sa fille a été, malgré tout, son échec et sa petite-fille, sa rédemption. Au cœur de cette intimité déchirante, Susie Boyt nous plonge dans les affres douloureuses des histoires de famille. Elle enlève le voile de la disgrâce. Elle magnifie ces petits détails de vie. Et, raconte la vie, l’amour avec force et courage. L’abandon, la résignation, la honte, la colère côtoient l’amour avec maladresse et tendresse. 

 

Ce premier roman est à couper le souffle. Portée par une plume intense, l’histoire nous propulse dans le maelström des émotions et l’intrinsèque des liens de ces femmes se battant contre leurs propres démons. La lâcheté, la fuite, ce geste d’accaparement, sont tout autant des preuves de faiblesse et la marque d’un amour incommensurable ou non considéré où l’espoir en serait la clef.

Laisser un commentaire