DOCUMENT

Éditions Paulsen – Collection Guérin

Quant le toit du monde s’ouvre au tourisme de masse. Une enquête fouillée de François Carrel sur un moment de bascule historique.
On a tous vu ces images de bibendums en combinaisons de duvet faisant la queue pour atteindre le sommet de l’Everest, ces monceaux de détritus abandonnés à 8000 mètres. On a entendu parler d’une princesse saoudienne escortée par un alpiniste népalais devenu une star grâce sur Netflix, d’hélicoptères déposant dans des zones interdites des milliardaires en mal de sensation forte avec la bénédiction de l’armée pakistanaise.
Que se passe-t-il sur le toit du monde ? Avec plus de 600 personnes au sommet de l’Everest en 2023, l’Himalaya, et plus généralement les quatorze sommets de plus de 8 000 mètres sont bel et bien entrés dans l’ère du tourisme de masse. La haute altitude est rendue accessible par des sherpas très professionnels qui équipent les voies d’ascension de cordes fixes, portent les bouteilles d’oxygène et l’équipement des clients, appuyés par une noria d’hélicoptères jusqu’aux camps de base.
Comment en est-on arrivé là ? François Carrel raconte et analyse le basculement qui fait entrer le tourisme d’altitude dans l’ère industrielle. L’histoire s’est accélérée au tournant des années 2020, lorsque les Népalais ont réussi la dernière  » conquête  » himalayenne, l’ascension hivernale du K2, et pris le contrôle du tourisme d’altitude. Elle s’incarne dans la figure d’un héros, Nims Dai, qui a enchaîné les quatorze 8 000 en six mois. Et permet à sa challenger, Kristin Harila, de battre sn record en trois mois et un jour.

À la conquête du toit du monde

Avez-vous comme rêves de gravir l’Everest ou le K2 ou les 14 plus hautes montagnes du monde ? Si cette discipline à longtemps était réservé aux alpinistes chevronnés, depuis quelques années ce sport de haut niveau se démocratise et permet aux téméraires lambdas de se payer un petit raid sympa et de côtoyer la frayeur. Nimsdai, Kristin Harila et notre petit représentant français Inoxtag, sont les figures emblématiques d’une nouvelle ère de l’alpinisme. Mais quelles sont les conséquences de cette nouvelle mode égocentrée ?

 

François Carrel, journaliste et alpiniste grenoblois, délivre ici son avis incisif teinté d’alarmisme et d’impuissance. La démocratisation de l’accès aux plus hauts sommets du monde a permis l’industrialisation de cette discipline qui jusqu’à quelques décennies, demandait une certaine rigueur et connaissance de la montagne. Aujourd’hui, un portefeuille bien garni est devenu le sauf-conduit pour accéder à l’inaccessible. Cet essor commercial a permis aux Sherpas de s’affranchir en quelque sorte. De plus, cette manne commerciale donne la possibilité, notamment au Népal, de s’enrichir. En effet, l’accès aux sommets est soumis à l’obtention d’un permis. 

 

L’Everest est devenu une zone touristique où des milliers de tentes se côtoient, dans des conditions d’hygiène peu recommandable où les déchets s’amoncellent sans que cela n’inquiète. L’exploit personnel prédomine loin du sens de l’alpinisme. Les conditions climatiques sont souvent sous-estimées, la prévention des risques est parfois ignorée, la folie des montagnes gagne, mais elle détruit également.

 

François Carrel pointe du doigt une évolution de l’alpinisme (au-delà des 8 000 m) non contrôlée où le profit prévaut sur une discipline exigeante. Différentes catastrophes ne ralentissent pas les néo alpinistes. Toutefois, il est bon de remarquer que certaines actions sont menées de front. Notamment en ce qui concerne les déchets pour lesquels le paiement d’une taxe est exigé et encaissé si les alpinistes ne descendent pas leurs déchets. 

 

Ce livre est intéressant en tout point de vue et ouvre la réflexion sur ce sujet. François Carrel alerte sur les risques et souligne le fait que les réseaux sociaux véhiculent une image biaisais des conditions de l’alpinisme.

Laisser un commentaire