
LITTÉRATURE CONTEMPORAINE
Éditions Buchet Chastel
« Mais s’il ne s’agissait pas d’un jeu ? Si à force de leur donner matière à y croire tes étudiants t’avaient pris au mot, s’ils avaient voulu appliquer à la lettre le contenu de ce texte que tu leur offrais en fin de cycle, ce texte dans lequel tu détaillais point par point la mise en actes des théories étudiées pendant leur cursus ? Serait-il alors envisageable qu’ils aient réussi, comme tu le préconisais, à renverser le pouvoir en place ? Non, tu ne peux l’envisager, pas dans la vie réelle, car sans doute, et c’est la seule explication plausible, sans doute rêves-tu, sans doute patauges-tu dans un mauvais sommeil, et tout s’arrêtera net quand ton réveil sonnera, quand ta femme se retournera dans le lit, et enfin cessera ce grand n’importe quoi dans lequel tu t’enlises et t’épuises. »
Enigmatique et poétique, C’est plus beau là-bas confirme le talent de Violaine Bérot. En ce début de millénaire, une autre vie est-elle encore possible ?
Un monde utopique
Je retrouve Violaine Bérot dans un registre différent à « Nue, sous la lune ».
Un roman a l’allure dystopique. Le narrateur dont il est difficile d’appréhender le point de vue (interne ou extérieur), raconte l’enlèvement, la séquestration et la remise en liberté d’un professeur de sociologie. Déshumanisé, parqué comme du bétail, cet homme en mode survie s’enfonce dans le mutisme, l’incompréhension et l’invisibilité. Un hangar, une bétaillère et des morts. Ces corps comme une simple chose. Le ciel, témoin passif de ces exactions. Le vent qui n’arrive plus à insuffler la vie. Il s’accroche. Il respire. Il boit. Il mange peu. Il n’est plus rien. Un seul corps doté d’une pensée qui se délite. Toute sa vie d’avant s’efface. Puis, il sort. Un long trajet qui lui annonce la fin. Et, cette apparition qui surgit dans les interstices du supplice. Une image forte chargée d’émotions. Il revit. Il respire. Lui, est de retour. Finalement, la fin ne sera pas la fin. Juste le passage obligé vers un ailleurs, vers une utopie. Là où tout est possible, tout à bâtir, tout à penser, tout à innover.
Mais, si tout ceci était son utopie, son rêve, est-il nécessaire de le vivre ? Pourquoi l’oblige-t-on ? Quel intérêt à ériger un modèle de vie dont les fondations seraient la solidarité, le partage ?

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